Les Indiens en Indochine

La présence d’une mosquée indienne à Hué autrefois me donne l’occasion d’évoquer la présence des indiens en Indochine.

Les premiers indiens sont arrivés à la demande des français peu après la conquête de la Cochinchine. Ces indiens, des tamouls, sont venus des territoires français en Inde, principalement de Pondichéry et de Karikal, au sud de l’inde. Ils avaient l’habitude de travailler avec les français, ils parlaient leur langue, ils étaient loyaux. Ils occupaient ainsi des postes subalternes dans l’administration. Leur statut spécifique leur permettait d’obtenir, tout comme les français fonctionnaires, des congés réguliers pour retourner dans leur pays. Certains travailleront aussi comme comptable dans les maisons de commerce de Saigon. Beaucoup plus tard, en 1909, des soldats indiens des territoires français viendront rejoindre les troupes françaises en Indochine.

On croise aussi d’autres indiens à Saigon, et notamment les cochers des « boites d’allumettes » ou « malabars », ces petites carrioles tirées par des chevaux locaux, et qui servent de moyens de transport collectifs.

Mais les plus connus sont les Chettys. Ils sont aussi tamouls, mais hindous. Ils forment la corporation des changeurs d’argent, des préteurs. Ils rendent d’innombrables services à la population locale, y compris les petits fonctionnaires français, car les banques ne prêtent qu’aux riches ! Bien sur, les taux sont proches de l’usure et les chettys, comme les chinois, sont souvent montrés du doigt. On ne les aime pas car leur profits sont renvoyés en Inde et ne profitent pas à la colonie. Certains sont devenus de gros propriétaires fonciers. La face visible de leur richesse est la beauté des processions qu’ils organisent lors des fêtes religieuses.

D’autres tamouls, des musulmans cette fois ci, sont venus aussi en Indochine pour faire du commerce. On les retrouve dans le commerce de l’or, de la bijouterie et surtout du textile. Les vietnamiens produisaient de l’étoffe grossière. Les français fabriquaient localement du tissus en grande quantité, mais ne se souciaient pas du gout des locaux. En revanche, le tissus des indiens avait une excellente réputation : prix, qualité et colories. Certains commerçants ont fait fortune, comme Adbul Aziz à Saigon et Mohamed Said à Hanoi. En 1928, Gilbert Tranh Chanh Chieu appelle au boycott de ces marchands de tissus indien, tout en incitant les vietnamiens à faire mieux. En vain.

Combien sont-ils en Indochine ? en 1910, on estime leur nombre à 1000. En 1937, on parle de 6000 indiens dont 1000 ou 2000 issus des territoires français. 1000 seraient musulmans. Comme on le voit, leur présence n’est pas considérable. Ils ont un avantage non négligeable par rapport aux locaux, c’est le droit de pouvoir circuler et de commercer librement partout.

Les indiens sont considérés comme de très bons commerçants, courtois, discrets, honnêtes. Mais on leur reproche de n’être « que de passage ». Ils sont solidaires entre eux, au sein de leur communauté. Ils se marient surtout entre eux. Les plus riches peuvent avoir une famille en Inde et une autre en Indochine. Les enfants sont éduqués en Inde et viennent en Indochine pour développer les affaires familiales.

Au départ des français, la situation des indiens est moins favorable avec le gouvernement Diem. Malgré une stricte neutralité, les indiens sont perçus par la population locale comme les « collaborateurs » des français puis des américains. Apres 1975, ils devront quitter le pays, comme tous les étrangers. Ceux qui viennent des anciens comptoirs français pourront partir librement en France, comme Français ou comme refugiés suivant leur statut.


Mosquee indienne à Saigon

Sources : gallica et des articles trouvés sur internet. Il ne semble pas exister d’ouvrages complets sur ce sujet. Cela pourrait faire l’objet d’une thèse intéressante.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *