Qui se rappelle encore de la princesse Astrid aujourd’hui ? En France, probablement pas grand monde, mais en Belgique, tout le monde ! La reine Astrid, c’est un peu la princesse Diana de l’époque, les affaires de cœur en moins. Une énorme popularité pour celle qui est devenue la reine de Belgique en 1934.
Mais revenons au début de l’histoire..
Astrid est princesse de Suède et épouse le prince héritier Léopold III de Belgique en 1926 à l’âge de 21 ans. Astrid a toujours eu une vie simple et décontractée avec sa famille et continue sur la même lancée avec son mari. Ils ont alors 2 enfants, dont le futur roi Baudouin, avant de décider de partir en 1932 en Extrême Orient. Ils avaient décidé de partir au Japon, mais les visées expansionnistes des japonais en Chine les en a dissuadées. Cap donc sur les territoires français, anglais, hollandais et américains ainsi que vers le siam indépendant. Il s’agit d’un voyage d’étude pour éclairer le futur roi sur la manière dont les pays mettent en valeur leurs possessions.
Donc ils voyagent incognito ou presque, en participant à peu de réceptions.
C’est donc début 1932 qu’ils embarquent à Gênes pour faire une première escale en Égypte pour visiter les pyramides. Puis le couple princier arrive à Singapour, visite Kuala Lumpur et Penang en Malaisie, possession anglaises. Ils rejoignent ensuite le Siam en train, train tiré par une locomotive diesel, une grande première pour la princesse..
A Bangkok, ils peuvent s’attarder en toute simplicité aux multiples rayons d’un grand magasin belge.
Le couple royal au Laos
Le 18 février, ils prennent un train spécial pour le nord du Siam. Ils gagnent en automobile le Mékong, à Xieng Sen, où ils sont accueillis par les autorités françaises. Les voici donc en Indochine !
Ils n’ont pas choisi la voie la plus facile pour entrer en Indochine. Ils s’embarquent en effet sur deux pirogues à moteur pour un trajet de 3 jours sur le Mékong, jusqu’à Luang-Prabang. Toute cette région du haut Mékong, empreinte de grandeur sauvage, les intéressa vivement. Les jours suivants, sites et monuments furent visités par les hôtes du roi Sisavong Vong.
La RC7, la route Astrid, au Laos
Le Laos a cette époque est encore très isolé et les conditions de circulation bien compliquées. Aucune personnalité de marque ne s’était aventurée avant eux sur ces territoires. C’est donc une grande fierté pour le Laos d’accueillir le couple royal.
Le 2 mars, le duc et la duchesse quittent en automobile le royaume Laotien. Ils atteignaient la fameuse route des crêtes par mille mètres d’altitude, franchissant à cheval une partie du trajet, et à pied le reste. La route n’est en effet qu’un chemin muletier ou il ne faut pas s’attarder, les tigres étant nombreux.. Ils sont accompagnés de porteurs Kha. Ils passent par la plaine des jarres et continuent en automobiles jusqu’en Annam. 600 km viennent de passer pour arriver enfin à proximité de Vinh. La, un train spécial les conduit à Hanoi.
Accueil du couple par le gouverneur Pasquier à Hanoi
Accueillis par le gouverneur de l’Indochine Pierre Pasquier, ils restent quelques jours pour visiter toutes les réalisations françaises de valeur et même la Légion étrangère où ils serrent la main à une trentaine de Belges.
Ils font une excursion en baie d’Ha long et visitent les charbonnages de Hongay. Ils visitèrent aussi Haiphong et son immense cimenterie.
Le lendemain, départ en train pour Hué. Ils sont accueillis par le régent Ton That Han et vont rendre visite à la mémoire française de la ville, Mgr Allys, vicaire apostolique de la ville, retiré dans sa maison de Phu Cam depuis qu’il a perdu la vue. Ils restent 2 jours à Hué, à peine le temps de visiter tous les monuments que les touristes d’aujourd’hui connaissent.
La visite du couple au regent de l’Annam
Le 15 mars, ils quittent Hué en train puis en voiture pour rejoindre Dalat. Le 18, arrivée à Saïgon. Une journée fut consacrée à une promenade dans la ville élégante qu’est la capitale de la Cochinchine et dans Cholon, la « métropole du riz ».
Ce sera ensuite une visite à Phnom Penh et aux « ruines d’Angkor » comme on les appelait à l’époque.
Le 25 mars, le couple royal embarqua sur le bateau Georges Philippar pour rejoindre Hong Kong. Il faut savoir que ce luxueux bateau des Messageries Maritimes coulera moins de 2 mois après, des suites d’un incendie, faisant plus de 49 victimes.
De Hong Kong, ils iront aux Philippines, où le Duc enrichira ses collections de reptiles, d’insectes et de plantes rares. Ils feront ensuite un arrêt aux Célèbes, un autre à Bornéo, pour quinze jours de jungle, et d’autres à Bali, à Java et à Batavia (Jakarta).
Ils embarquent enfin le 27 mai 1932 sur le MS Baloeran, un paquebot hollandais, pour leur retour en Europe et accosteront à Marseille.
Photo publiée dans l’Excelsior au retour du voyage du couple
Quelques mois plus tard, Astrid devient reine des Belges lorsque son époux prête le serment constitutionnel le 23 février 1934.
La reine Astrid en tenue orientale
Mais en 1935, c’est le drame. Alors qu’ils sont en vacances en suisse sans leurs enfants, Léopold III décide de conduire lui-même sa nouvelle voiture Packard. Il en perd le contrôle, et sa femme meurt sur le coup. C’est un immense choc pour la Belgique. 500 000 personnes viendront rendre hommage à la défunte dans la chapelle ardente et ses funérailles, le 3 septembre 1935, seront suivies par des millions de personnes à travers l’Europe.
L’histoire n’est pas tout à fait finie pour l’Indochine. En 1938, la route de Luang Prabang à Vinh, la RC 7, est inaugurée. Elle portera le nom de la Reine Astrid. Un monument est dessiné par l’architecte Lagisquet, bien connu à Hanoi, et réalisé par le sculpteur George Khanh. Ce monument était positionné à Phu Dien, à l’intersection entre la route Astrid et la route mandarine, 6 ans après le passage du couple royal.
Le circuit du couple royal en indochine
Sources principales: gallica, les annales coloniales (mars 1933), journal Le Temps et Excelsior, L’eveil Economique, internet