Témoignage: «un camp scout à Djiring»

« Dans les années 50, peut être en 1957, nous avons participé à un camp scout dans une léproserie où œuvraient des pères catholiques. A la lecture du blog, je sais aujourd’hui que son créateur était le père Cassaigne, et que les lépreux étaient des moÏs, les habitants de ces hauts plateaux. La léproserie portait le nom de « kala ». Elle était implantée en contrebas de la petite ville de Djiring, elle même sur la route reliant Saïgon à Dalat. Kala était composée de plusieurs constructions de bois et de tôles. Les religieux avaient constitué une troupe de louveteaux, que nous affrontions de temps en temps, pour des tournois de jeu du foulard, ou de football. Tous les matins, après la toilette, nous faisions du sport sur un petit terrain de football. Ce terrain est visible sur la photo aérienne. On y distingue le talus où se tenaient assis nos « admirateurs ». La construction coupée sur la photo, en bas à droite, devait être la chapelle.  »

« La séance de sport matinale intriguait les moïs. Et au fil des jours, nos curieux se faisaient de plus en plus nombreux. Sous les regards de nos « admirateurs », nous devions exécuter des mouvements de gymnastique.
Un matin, il arriva un incident cocasse. A la fin d’un enchainement de mouvements, notre cheftaine nous demanda d’exécuter une série de saute-moutons. Il y avait dans notre troupe un louveteau un peu gros. Quand vint le tour de ce dernier, à son premier saut, sa réception fut un désastre, son short tomba, le découvrant nu comme un ver sous les yeux ébahis de nos spectateurs. En un instant ce fut des éclats de rires. »

« Pendant ce même séjour, il avait été décidé que nous irions visiter un village moïs. Le jour dit, on partit tous en file indienne derrières nos guides adultes, et de louveteaux moïs. Après un début de parcours facile, on commença à pénétrer dans la forêt humide où les plantes dégoulinaient et nous avaient rapidement trempé. Les feuilles que nous devions écarter tout le long du sentier étroit déposaient sur nous des sangsues luisantes et noires. A chaque arrêt, c’était l’inspection des bras, des jambes, et des chaussures. Les sangsues, parfois 5 par jambes, venaient aussi se coller sur les bras, et dans le cou. Une grande personne venait avec une cigarette allumée pour les brûler puis les détacher.  »


Arrivée au village moi

« La marche était assez longue et quand on aperçut des rangées de bambous dressés devant nous en fin de journée, c’était le soulagement. Pour pénétrer dans le village fortifié, il fallait marcher sur une cinquantaine de mètres, au milieu d’un étroit couloir de hauts bambous aux pointes acérées.
Nous étions fatigués par la longue marche et par les « prises de sang » à répétitions. Après un rapide repas, on nous dispersa dans les huttes sur pilotis. Leurs planchers étaient à un mètre cinquante environ du sol. Ces huttes étaient toute en longueur et pouvaient abriter une grande famille au complet. Pour pénétrer à l’intérieur, il fallait se baisser, puis marquer un temps d’arrêt, de façon à s’habituer à l’obscurité. Une très forte odeur de fumée, provenant d’un petit foyer, nous étouffait. Comme aucune cheminée n’était prévue, la fumée s’accumulait sur la moitié supérieure de l’habitacle. Le trop plein s’échappait entre les bambous et par la petite entrée. A l’intérieur, il était difficile de se déplacer, tant il faisait sombre. Tout déplacement se faisait au petit bonheur la chance. »

« Ce village était un peu différent de celui de photo, car la grande forêt venait plus près des huttes, et ces dernières étaient toutes sur pilotis. »

« Cette seule nuit passée avec les Moïs, je m’en souviens bien encore. Une nuit interminable, où j’avais du mal à trouver le sommeil, tout enfumé comme un jambon. Autour de ce feu, des hommes ont parlé pratiquement toute la nuit. A moitié asphyxié, j’étais aussi terrorisé par une grosse chose qui pendait au dessus de ma tête: une énorme jarre suspendue par des lanières. Avant de trouver le sommeil, je fis une prière pour que les lanières végétales tiennent bon.
Le lendemain, retour par le même chemin, où tout le long, nous avons servi de repas aux sangsues sournoises, qui nous attendaient.
Ce séjour à Kala fut quand même bénéfique car à ce moment là, mon frère et moi avions beaucoup de verrues aux genoux. Quelle ne fut pas notre surprise de les voir toutes disparaître à notre retour à Saïgon. Peut être était-ce grâce à nos baignades répétées dans le petit ruisseau qui traversait la léproserie ? »

Jean Pierre Hua, 2022

Mgr Cassaigne, un missionnaire au service des lépreux

Le souvenir du Père Cassaigne est toujours aussi vivant, comme en témoigne la récente publication d’un remarquable ouvrage de photos historiques. Il faut dire que le Père Cassaigne est aimé tant en France qu’au Vietnam, et qu’une procédure de béatification a été décidée par les évêques vietnamiens en 2019.


Le Père Cassaigne en 1956

Mais revenons au début de son histoire. Jean Cassaigne est né en 1895 dans les Landes. Il a très vite l’esprit missionnaire et intègre les MEP en 1920. Il est nommé en Indochine en 1926 et rejoint les Haut Plateaux en 1927 avec pour mission de créer un nouveau poste à Djiring (Di Linh aujourd’hui), non loin de Dalat, auprès des ethnies minoritaires. Pas facile de se retrouver seul au milieu d’une nature hostile avec des montagnards démunis de tout. Il doit apprendre leur dialecte, le K’ho, et s’attache à publier les premiers lexiques de conversation. Mais son action est ébranlée à la suite de la mort d’une lépreuse, mise au ban de sa communauté. Il décide alors d’aider ces exclus en fondant une léproserie sur un terrain à quelques kilomètres de Djiring. Il veut sortir les lépreux de leur isolement et leur demande de participer à sa construction. Les chefs des villages aux alentours s’associent aussi au projet. En mars 1929, 16 paillottes sont construites, accueillant 21 lépreux. L’entraide gouverne la vie quotidienne. Les plus vaillants aident les plus atteints. Le père Cassaigne crée aussi une atmosphère de joie en organisant des fêtes. Les lépreux sont devenus « des personnes ». Des amis du père Cassaigne lui offrent une Citroën 5cv Trèfle. Elle servira aussi à faire fonctionner un projecteur de cinéma et diffuser les films de Charlot aux lépreux. Le succès est immédiat, les lépreux retrouvent la joie de vivre et le plaisir de rire. L’institut pasteur fournit les médicaments et l’administration finit par soutenir financement la léproserie. Bien sur, la dimension spirituelle de l’œuvre n’est pas oubliée. « La vocation d’un missionnaire, c’est d’aider et servir les malheureux et par la charité, les amener au Christ ». De fait, la plupart des lépreux se sont convertis au christianisme avant de mourir.


Le Père Cassaigne dans son bureau en 1926


La léproserie de Djiring en 1952, après la reconstruction

Les années passent, la léproserie prend de l’ampleur. Mais la maladie n’épargne pas le père Cassaigne. Il souffre depuis le début de fréquentes crises de paludisme qui le font souffrir. Il doit repartir en 1932 plusieurs mois en France pour se reposer. En 1938, il reçoit le soutien des religieuses qui viennent l’épauler dans la léproserie.


Le Pere Cassaigne (à droite) au milieu des siens avec le Père Parrel de Cai Mong en 1926

Ce qu’il appelle « une tuile » finit par se produire. Il est nommé vicaire apostolique (c’est-à-dire évêque) de Saigon en 1941. Lui, heureux au milieu des siens, habitué à la vie en brousse, se voit propulser au milieu des mondanités et des affaires du monde ! Son sacre en la cathédrale de Saigon vit la présence d’une délégation de ses chers montagnards, venus en costume « local ». Saigon en a gardé le souvenir pendant longtemps.
Le père Cassaigne, devenu Monseigneur, allait rester 14 ans à ce poste, assistant à tous les événements dramatiques de l’époque : l’occupation japonaise, le coup de force du 9 mars 1945, les combats avec le vietminh, la guerre d’Indochine… Il apportera du réconfort à tous aux souffrances de la guerre. Par ses actions, il en a impressionné plus d’un et notamment les occupants japonais. Le colonel Amano, officier responsable des liaisons avec les Français, finira même par se convertir au catholicisme à son retour au Japon.


Lors du « sacre » à Saigon, en 1941

Fin 1954, il découvre qu’il est atteint lui aussi de la lèpre. Il démissionne en mars 1955 pour reprendre son poste à Djiring. Il restera auprès de ses lépreux jusqu’à son décès, fin octobre 1973. Il est inhumé au milieu du village des lépreux.


L’église de Djiring en 1941

Aujourd’hui, le village existe toujours. Il est géré conjointement par les autorités vietnamiennes et les Filles de la charité Saint Vincent de Paul. La tombe du Père Cassaigne y est toujours honorée. Son souvenir reste vivace au sein de nombreux Vietnamiens.

En France, l’association « les amis de Mgr Cassaigne » est très active. Elle est à l’ origine de la publication du très beau livre dont sont tirées les photos présentées dans cet article. Le livre, riche de 162 photos, peut être commandé sur le site de l’association https://www.helloasso.com/associations/les-amis-de-mgr-jean-cassaigne/

Sources:
– photos: extraites du livre « Jean Cassaigne, l’évêque des lépreux », avec l’aimable autorisation de l’association.
– texte: d’après le site Ifra et le livre « La Lèpre et Dieu, Jean Cassaigne », de Louis et Madeleine Raillon.

A voir aussi:
– article de la revue Indochine parue en 1943 : ArticleIndochineCassaigne1943.pdf
– autre article, également paru dans la revue Indochine:leproserieDjiring.pdf
– carte du Haut Donai vers 1943, revue Indochine : carteDjiring1943RevueIndochine.pdf

Le peintre Mai Thu

Faut-il encore présenter Mai Thu ? Pour les gens de ma génération, il s’est fait connaitre en occident à travers les illustrations des cartes de vœux de l’Unicef, très en vogue avant l’arrivée d’internet. Les enfants aux traits simplifiés mais aux couleurs vives ont eu un immense succès.


Portrait d’une princesse royale présenté lors de l’expo de Macon

Mais Mai Thu, ce ne sont pas que des décors de cartes de vœux ou autres puzzles ! C’est un artiste aux talents multiples auquel l’exposition organisée en 2021 à Chalon sur Saône a rendu un immense honneur.
A défaut d’avoir pu voir l’exposition, je me suis rabattu sur le très beau livre édité à cette occasion. Un bel hommage pour cet artiste vietnamien mort en 1986.


L’un des tableaux exposés à Macon (source: livre de l’expo)

Rappelons que Mai Thu est né en 1906 près de Haiphong. Il est le fils du vice-roi de Bach Ninh, dans un milieu aisé donc. Il fait parti de la 1ere promotion de l’Ecole des Beaux Arts de l’Indochine à Hanoi, 6 élèves seulement. Cette école, voulue par Nan Son, va révolutionner l’art au Vietnam. Sous l’impulsion de Victor Tardieu, son fondateur et directeur, et d’artistes venus de France, l’enseignement vise à susciter un art aux techniques certes modernes mais puisant toute son inspiration dans le pays même. La peinture sur soie, le laquage sont ainsi revisités, les sujets ne sont plus uniquement religieux ou cultuelles. Mai Thu sort diplômé de l’école en 1930, au coté d’artistes devenus depuis célèbres comment Le Pho ou Nguyen Phan Chanh.

Les débouchés artistiques sont inexistants dans l’Indochine de cette époque. Les maisons traditionnelles des notables ne se prêtent guère aux peintures « modernes ». Mai Thu est donc nommé comme professeur de dessin au lycée Khai Dinh à Hué (futur lycée Quoc Hoc) ou il restera 6 ans.


Mai Thu à Hué, devant le pont Kho, peu avant son départ pour la France

Sur place, il en profite aussi pour approfondir ses dons de musicien notamment dans la pratique d’un instrument monocorde traditionnel. Il dessine aussi pour des revues de mode et participe à des concours de timbres postaux. Si son poste de professeur lui permet de vivre, il continue de peindre et d’exposer lors d’expositions organisées par son ancienne école, au Vietnam, au Japon et en Europe. En 1932, il expose notamment à la Résidence Supérieure de Hué au coté de peintres français comme Louis Rollet. Au cours de cette exposition, il vendra une toile à l’empereur Bao Dai. A la différence des peintres voyageurs français, qui privilégient les paysages, les artistes vietnamiens font de nombreux portraits, en sublimant notamment la beauté des femmes locales.


Mai Thu en train de peindre au tombeau de Tu Duc, à Hué (source: livre de l’expo)

En 1937, Mai Thu part pour la France, officiellement pour participer à l’exposition des arts décoratifs de Paris. Sans doute aussi pour rejoindre ce pays dont on lui dresse un portrait idyllique..C’est aussi pour fuir un mariage arrangé par ses parents ! Il part avec Le Pho et Vu Cao Dam qui, eux, connaissent déjà la France. Tous les 3 savent que la France leur offrira des débouchés que l’Indochine traditionnelle est incapable de leur fournir.

Les 3 artistes s’installent à Paris et participent aux salons des indépendants. Mai Thu s’engage dans l’armée française au début de la guerre. Il sera démobilisé en 1941 à Macon ou la bourgeoisie locale ne tarde pas à le remarquer et à lui commander des portraits.

De retour à Paris, il rompt avec la peinture à l’huile pour se consacrer entièrement à la peinture sur soie, afin d’affirmer ses origines et se distinguer des peintres français. La technique de la peinture sur soie nécessite une grande maitrise, car aucun repentir n’est possible. Il s’adapte aux contraintes occidentales en encadrant ses œuvres au lieu de les rouler comme en Asie.

Il expose fréquemment dans des galeries et il en vit confortablement. Dans les années 60, il multiplie les toiles dont des petits formats, accessibles à toutes les bourses. Les femmes vietnamiennes en « ao dai » lui assurent un grand succès tout comme les scènes de jeux, les enfants, la tendresse maternelle.
Il va progressivement simplifier les silhouettes, quittant ainsi le réalisme, en introduisant des couleurs plus vives. Son art est subtil, ses compositions sont totalement maitrisées.. « Ses enfants » repris par l’Unicef le feront connaitre mondialement. Perfectionniste, il attache aussi beaucoup d’importance aux cadres qu’il réalise lui-même.

Il évoque aussi fréquemment la souffrance du peuple vietnamien dans ses œuvres, en écho à une guerre sans fin.

Il meurt en 1980 à Clichy et il est enterré au cimetière de Vanves. Tombé dans l’oubli après sa mort, Mai-Thu, à l’instar d’autres artistes formés à l’Ecole des beaux-arts d’Hanoï, a retrouvé un succès grandissant dans les salles de ventes, en Europe ou à Hong Kong. Ses toiles sont aussi abonnement copiées. Mai Thu revient aussi en grâce auprès des autorités vietnamiennes, à juste titre car il a toujours défendu la paix dans son pays natal. Une rue porte son nom à Haiphong.

A voir:
– site internet http://www.mai-thu.fr/, par la fille de Mai Thu,
– les principales toiles présentées lors de l’expo de Macon en 2021, https://www.parisladouce.com/2021/07/expo-mai-thu-1906-1980-echo-dun-vietnam.html
– livre « Mai Thu, echo d’un Vietnam rêvé », lié a l’exposition de Macon
– article paru en 1932 sur l’exposition de Hué
1932_10_01_ExpopeintureHueRolletMaiThu.pdf

Il y a 90 ans : la Princesse Astrid et le futur roi Leopold III en Indochine

Qui se rappelle encore de la princesse Astrid aujourd’hui ? En France, probablement pas grand monde, mais en Belgique, tout le monde ! La reine Astrid, c’est un peu la princesse Diana de l’époque, les affaires de cœur en moins. Une énorme popularité pour celle qui est devenue la reine de Belgique en 1934.

Mais revenons au début de l’histoire..
Astrid est princesse de Suède et épouse le prince héritier Léopold III de Belgique en 1926 à l’âge de 21 ans. Astrid a toujours eu une vie simple et décontractée avec sa famille et continue sur la même lancée avec son mari. Ils ont alors 2 enfants, dont le futur roi Baudouin, avant de décider de partir en 1932 en Extrême Orient. Ils avaient décidé de partir au Japon, mais les visées expansionnistes des japonais en Chine les en a dissuadées. Cap donc sur les territoires français, anglais, hollandais et américains ainsi que vers le siam indépendant. Il s’agit d’un voyage d’étude pour éclairer le futur roi sur la manière dont les pays mettent en valeur leurs possessions.
Donc ils voyagent incognito ou presque, en participant à peu de réceptions.

C’est donc début 1932 qu’ils embarquent à Gênes pour faire une première escale en Égypte pour visiter les pyramides. Puis le couple princier arrive à Singapour, visite Kuala Lumpur et Penang en Malaisie, possession anglaises. Ils rejoignent ensuite le Siam en train, train tiré par une locomotive diesel, une grande première pour la princesse..

A Bangkok, ils peuvent s’attarder en toute simplicité aux multiples rayons d’un grand magasin belge.

Le couple royal au Laos

Le 18 février, ils prennent un train spécial pour le nord du Siam. Ils gagnent en automobile le Mékong, à Xieng Sen, où ils sont accueillis par les autorités françaises. Les voici donc en Indochine !

Ils n’ont pas choisi la voie la plus facile pour entrer en Indochine. Ils s’embarquent en effet sur deux pirogues à moteur pour un trajet de 3 jours sur le Mékong, jusqu’à Luang-Prabang. Toute cette région du haut Mékong, empreinte de grandeur sauvage, les intéressa vivement. Les jours suivants, sites et monuments furent visités par les hôtes du roi Sisavong Vong.


La RC7, la route Astrid, au Laos

Le Laos a cette époque est encore très isolé et les conditions de circulation bien compliquées. Aucune personnalité de marque ne s’était aventurée avant eux sur ces territoires. C’est donc une grande fierté pour le Laos d’accueillir le couple royal.

Le 2 mars, le duc et la duchesse quittent en automobile le royaume Laotien. Ils atteignaient la fameuse route des crêtes par mille mètres d’altitude, franchissant à cheval une partie du trajet, et à pied le reste. La route n’est en effet qu’un chemin muletier ou il ne faut pas s’attarder, les tigres étant nombreux.. Ils sont accompagnés de porteurs Kha. Ils passent par la plaine des jarres et continuent en automobiles jusqu’en Annam. 600 km viennent de passer pour arriver enfin à proximité de Vinh. La, un train spécial les conduit à Hanoi.


Accueil du couple par le gouverneur Pasquier à Hanoi

Accueillis par le gouverneur de l’Indochine Pierre Pasquier, ils restent quelques jours pour visiter toutes les réalisations françaises de valeur et même la Légion étrangère où ils serrent la main à une trentaine de Belges.

Ils font une excursion en baie d’Ha long et visitent les charbonnages de Hongay. Ils visitèrent aussi Haiphong et son immense cimenterie.

Le lendemain, départ en train pour Hué. Ils sont accueillis par le régent Ton That Han et vont rendre visite à la mémoire française de la ville, Mgr Allys, vicaire apostolique de la ville, retiré dans sa maison de Phu Cam depuis qu’il a perdu la vue. Ils restent 2 jours à Hué, à peine le temps de visiter tous les monuments que les touristes d’aujourd’hui connaissent.


La visite du couple au regent de l’Annam

Le 15 mars, ils quittent Hué en train puis en voiture pour rejoindre Dalat. Le 18, arrivée à Saïgon. Une journée fut consacrée à une promenade dans la ville élégante qu’est la capitale de la Cochinchine et dans Cholon, la « métropole du riz ».

Ce sera ensuite une visite à Phnom Penh et aux « ruines d’Angkor » comme on les appelait à l’époque.
Le 25 mars, le couple royal embarqua sur le bateau Georges Philippar pour rejoindre Hong Kong. Il faut savoir que ce luxueux bateau des Messageries Maritimes coulera moins de 2 mois après, des suites d’un incendie, faisant plus de 49 victimes.

De Hong Kong, ils iront aux Philippines, où le Duc enrichira ses collections de reptiles, d’insectes et de plantes rares. Ils feront ensuite un arrêt aux Célèbes, un autre à Bornéo, pour quinze jours de jungle, et d’autres à Bali, à Java et à Batavia (Jakarta).

Ils embarquent enfin le 27 mai 1932 sur le MS Baloeran, un paquebot hollandais, pour leur retour en Europe et accosteront à Marseille.


Photo publiée dans l’Excelsior au retour du voyage du couple

Quelques mois plus tard, Astrid devient reine des Belges lorsque son époux prête le serment constitutionnel le 23 février 1934.


La reine Astrid en tenue orientale

Mais en 1935, c’est le drame. Alors qu’ils sont en vacances en suisse sans leurs enfants, Léopold III décide de conduire lui-même sa nouvelle voiture Packard. Il en perd le contrôle, et sa femme meurt sur le coup. C’est un immense choc pour la Belgique. 500 000 personnes viendront rendre hommage à la défunte dans la chapelle ardente et ses funérailles, le 3 septembre 1935, seront suivies par des millions de personnes à travers l’Europe.

L’histoire n’est pas tout à fait finie pour l’Indochine. En 1938, la route de Luang Prabang à Vinh, la RC 7, est inaugurée. Elle portera le nom de la Reine Astrid. Un monument est dessiné par l’architecte Lagisquet, bien connu à Hanoi, et réalisé par le sculpteur George Khanh. Ce monument était positionné à Phu Dien, à l’intersection entre la route Astrid et la route mandarine, 6 ans après le passage du couple royal.


Le circuit du couple royal en indochine

Sources principales: gallica, les annales coloniales (mars 1933), journal Le Temps et Excelsior, L’eveil Economique, internet

Quoi de neuf à Hué en 2021 ?

L’année 2021, comme la précédente, a été particulière en raison du covid. Comme en France, on a vu exploser les livraisons à domicile. Les conducteurs de motos conduisent n’importe comment, remplaçant pour un temps la conduite hystérique des chauffeurs de taxi. Quand la normalité reviendra, avec à la fois des motos, des bus et des taxis, sortir sera une épreuve de survie !


Pas un visiteur dans la citadelle pendant de nombreux mois. On se sentait « chez nous » !

Le centre ville de Hué continue de s’embellir. Les promenades le long de la rivière sont terminées et les habitants s’y pressent, à pied ou avec de luxueux vtt. Une partie de l’ile du Tigre, sous le pont de chemin de fer, a été aménagé en parc.

Dans la citadelle, le palais Kien Trung est toujours en construction. On prévoit une reconstruction du palais Can Chanh, riche de nombreuses colonnes en bois de fer. Le porte Ngo Nom a été ré-ouverte, elle est superbe.


La magnifique porte Ngo Mon de la citadelle de Hué

Les murailles de la citadelle extérieure ont été dégagées des constructions, occasionnant de nombreuses destructions de maisons.
La rénovation du tombeau du roi Dong Khanh, proche du tombeau de Tu Duc, a été finalisée, après plus d’une décennie de travaux. Cela inclut aussi la rénovation de tombes tout autour, donc celui du Prince Canh, fils de Gia Long, venu à Versailles peu avant la révolution française. Le pont couvert a été reconstruit, il est à present terminé.

En ville, on continue d’assister à une explosion du nombre de cafés. Pour contrer la concurrence et attirer les « selfies », certains construisent des bâtiments originaux dont on se demande à quoi ils pourront servir en cas de cessation d’activités.. La mode est aussi au « thé au lait » qui attire la gente féminine.


Un café « culturel », L’art à Hué, dont le nom provient d’un ouvrage des Amis du Vieux Hué

Le bâtiment du « café La Gare », dont j’ai parlé à plusieurs reprises, a subit d’importants travaux de rénovation. Cela devrait être un nouveau.. café !


L’ancien café de la gare, en cours de rénovation

Du coté culturel, on a été bien en peine cette année, en raison de la fermeture des cinémas et de la récente salle de l’academie de musique en raison du covid. Le festival a été a nouveau annulée en 2021, rien n’est encore prévu pour 2022.

Les pharmacies continuent de pousser comme des champignons. L’offre va-t-elle augmenter la demande ??? Les superettes Vinmarts, grandes gagnantes des confinements dans les grandes villes, semblent faire partir à présent du paysage. Elles ont remplacé toutes les autres.

L’année 2021 a surtout vu une explosion des prix des légumes et des fruits. Est-ce lié au covid, aux conditions climatiques ? je n’en sais rien. A la différence de la France ou l’on ne parle que de ca, ici, c’est silence radio. Le prix de l’essence, est autour de 0,9 euros le litre (février 2022).

C’est toujours la guerre contre les vendeurs de rues. La municipalité ; comme partout dans les villes du Vietnam, n’en veut plus. Ils doivent louer des commerces pour continuer à exercer. Les marches débordent aussi moins à l’extérieur. C’est une partie de l’âme du Vietnam qui disparait.

Malgré cela, l’argent semble continuer à couler a flot. Les riches sont toujours plus riches. Quant aux pauvres, ils sont invisibles. Ils doivent pourtant bien souffrir… Les restaurants et la plupart des cafés sont pleins.
A noter que l’on voit de plus en plus de voitures Peugeot ! des SUV bien polluants, les voitures électriques n’étant pas encore arrivées au Viêtnam.


Construction extravagante le long de la rivière des parfums. Aucune fenêtre ne donne sur la rivière.. C’est sur, les vietnamiens n’ont pas les meme gouts que nous..

Les hôtels sont vides depuis 2 ans, et seul un nouveau resort japonais s’est ouvert en 2021 le long de la route vers la plage. Ce vaste établissement, onsen resort, tire profit d’une source d’eau chaude pour offrir des soins traditionnels de bien-être japonais. Plus loin, au niveau de l’aéroport mais entre la plage et la lagune, un immense projet est annoncé, sur 170 hectares: golf, resort, centre de loisirs.. Il était prévu au meme endroit un autre projet de loisirs mené par un groupe espagnol. Est il abandonné, je ne le sais pas. L’aeroport lui meme est en cours d’agrandissement, pour répondre à l’objectif d’avoir des vols directs depuis l’étranger, et notamment du japon.


Vue du plan d’eau du resort Onsen

Les étrangers sont quasiment tous partis. Il en reste quelques uns, au statut d’investisseurs ou de conjoint. Trouver un plat étranger à Hue, à part les pizzas, est difficile. La culture vietnamienne reste bien ancrée sur ses traditions.


Les objets votifs, une valeur sure à Hué !

Année du Tigre à Hoi An

Comme l’annee dernière, nous sommes allés à Hoi An pour le Tét! Avec le Covid latent au Vietnam, on pensait avoir du mal à voyager, mais non, le Vietnam rend à present possible tout déplacement sans contrôle. Mais les touristes étrangers ne sont toujours pas là. C’est meme une ville encore plus vide que nous avons vue. En 2021, il y avait quelques étrangers. Cette année, quasiment aucun étrangers, ils sont tous, à quelques exceptions près, repartis..


Détail d’un intérieur d’une congrégation chinoise

Beaucoup d’hôtels sont fermés, notamment les hotels luxueux. De meme que les restaurants destinés aux étrangers..
La ballade dans les rues de la vieille ville est emprunte de nostalgie. Les boutiques sont fermées et vides, mais les bâtiments sont « dans leur jus », magnifiques.

Les vietnamiens y viennent pour la journée.

Avant le Tét, c’est le célèbre marché aux fleurs qui domine. La variété de fleurs est, année après année plus riche. C’est un spectacle toujours extraordinaire.

Un café a eu la bonne idée de fleurir ses espaces. Les vietnamiens, qui adorent les selfies, sont comblés!

Nous, on a préfèré prendre notre temps pour découvrir des endroits qu’on ne voit pas lors de l’affluence. Les congrégations chinoises, parfaitement maintenues en état, sont des lieux incroyables de beauté.


Les pécheurs ne sont pas non plus à la traine pour rendre le culte aux ancêtres et aux génies protecteurs


Nettoyage de printemps pour les portiques de rue

Nous sommes allés boire un café dans une vieille maison de style colonial. La famille propriétaire nous explique que cette maison, construite en 1932, fut occupée par une institutrice travaillant pour les Français mais qui a préférée partir au nord Viêtnam en 1954. Le terrain, rogné à plusieurs reprises, fait maintenant 1200m2. Le tout est en vente pour 100 millions de VND par m2, soit une valeur totale de 4,8 millions d’euros ! Le terrain est pourtant à 2km de l’hyper centre. On nous apprend par la meme occasion que les prix sur la rue Tran Phu à Danang sont à 300 millions VND / m2.. une paille.

Les rues vides de Hoi An ont laisse place a une foule incroyable de Vietnamiens dès le 2eme jour du Tét. Et chose inespérée, le célèbre restaurant et salon de thé Cargo a réouvert soudainement! Comme quoi, les choses peuvent changer du jour au lendemain, et c’est le cœur leger et optimiste que nous sommes rentrés à Hué.